#5 - Emilie L, le cran de faire autrement 🚀
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La quarantaine d’Emilie c’est diriger autrement l’agence qu’elle a créée il y a près de quinze ans avec son associé, utiliser la temps libéré pour son podcast, son engagement associatif et son activité de coaching pour montrer à d’autres les bienfaits de la confiance, de la délégation et de la transparence en entreprise.
Emilie est une ancienne parisienne. Depuis sept ans, elle habite à Lyon. Fin 2015, une suite d'événements sans lien apparent mais franchement éprouvants l’ont poussée à changer d’air. La vie à Lyon a donc été un nouveau départ pour elle, mais aussi pour la boîte qu’elle a créée six ans plus tôt avec son associé. L’agence Whodunit est spécialisée dans la création de sites Internet sur l’outil WordPress. Aujourd’hui, Emilie est très investie dans l’écosystème web local via une association qui œuvre depuis dix ans dans la région. C’est un lieu de rencontres et d’entraide «où l’on se fiche de ta carte de visite, de ton chiffre d’affaires ou du nombre de salariés que tu emploies». Dans les évènements organisés par la Cuisine du web, on échange honnêtement ses besoins et on tisse une toile bien serrée de contacts très utiles. Le format des rencontres varie, du plus petit, la Brigade qui rassemble une vingtaine de personnes sur une thématique au plus grand, le BlendWebMix qui mobilise plus de 3000 personnes chaque année. Emilie évoque les activités de l’asso, les yeux brillants. Certainement parce qu’elle est le creuset de ce qui l’anime au quotidien. Le numérique, l’entraide et l’humain.
Elle rêvait d’entrer dans la police. Ce n’était pas une lubie mais une vocation longuement mûrie pendant son adolescence, période à laquelle cette idée l’a «obsédée».
Pourtant, plus jeune, Emilie envisageait d’emprunter une voie très différente. Elle rêvait d’entrer dans la police. Ce n’était pas une lubie mais une vocation longuement mûrie pendant son adolescence, période à laquelle cette idée l’a «obsédée». Le bac en poche, elle passe le concours pour devenir gardien de la paix «sans aucun problème». Avant d’être recalée à la dernière étape «par le psy». On lui explique qu’elle est «incompatible» avec le métier parce qu’elle n'est pas résolue à obéir aux ordres quand elle les trouve «illogiques ou idiots». Elle a dix-huit ans et un idéal qui s’effondre. Alors qu’elle aurait pu décider de repasser le concours, elle prend ce refus comme la dénonciation d’un fantasme mal câblé et décide de se réinventer.
Internet est encore balbutiant et ado, «elle avait un ordinateur». Du coup, elle s’y connaît un peu. Avec le sentiment qu’elle a de l’avance dans le domaine puisque le reste du monde est encore complètement novice, elle se met en tête de décrocher un CDI. Et ça marche. Elle est rapidement recrutée par Air France pour faire du dépannage téléphonique de problèmes informatiques «assez basiques». Ça tombe bien. C’est l’occasion pour Emilie de mettre les mains dans le cambouis et de se former. Aussitôt dit, aussitôt fait, en parallèle de son job, elle monte avec un associé une entreprise de dépannage informatique.
Au bout de deux ans, elle en a marre «des clients qui disent qu’ils n’ont pas touché l’ordinateur mais que d’un coup ça ne marche plus».
Au bout de deux ans, elle en a marre «des clients qui disent qu’ils n’ont pas touché l’ordinateur mais que d’un coup ça ne marche plus». Alors ils décident de tout arrêter. Et encore une fois, Emilie saisit l’opportunité pour continuer d’apprendre. Elle se forme en graphisme. Et se lance en tant que freelance. Elle travaille pour de grands groupes et puis très naturellement, elle pivote. Elle décide de monter une agence avec l’un de ses collègues qui devient son associé. Pour Emilie, créer une entreprise, c’est une évidence pour elle. Ce n’est pas un tournant, c’est «la suite du parcours».
Il s’en est passé des choses depuis ce jour de 2009 où Emilie et Nandor ont monté l’agence Whodunit. Ensemble, ils ont navigué les eaux changeantes de l’entreprenariat web et ça n’a pas été de tout repos. Une grosse claque en 2015 les a forcés à prendre un nouveau départ. En renaissant de leurs cendres, ils ont eu l’audace de se lancer dans le 100% télétravail. Une réforme profonde de la manière de travailler, de l’âme de l’entreprise qui leur a permis de faire grossir leurs revenus sans augmenter leur charge de travail ou accabler leurs employés. C’est du gagnant-gagnant-gagnant. Un cercle vertueux comme on les rêve. Cette entreprise, ils la dirigent encore aujourd’hui. Elle emploie vingt-six professionnels qui évoluent dans un «écosystème vertueux».
Ils commencent «comme des cons» à se chercher un open space à Paris pour montrer qu’ils sont «une vraie agence de création de site Internet».
Pourtant Emilie et son associé sont, au départ, plutôt du genre «comme tout le monde». Ils commencent «comme des cons» à se chercher un open space à Paris pour montrer qu’ils sont «une vraie agence de création de site Internet». Ils sont parisiens. Leurs employés aussi. Et comme tout le monde encore, ils passent leur temps dans les embouteillages. Ça marche un temps. Mais en 2013, quatre ans après la création de l’entreprise, une brèche dans la façade bouscule leurs croyances. Emilie assiste à une conférence à Sofia avec deux de ses salariés. Elle y écoute avec attention la présentation d’un directeur d’agence WordPress, tout comme la leur, qui parle du 100% télétravail. «Il racontait que le matin il allait surfer avant d’aller rencontrer ses clients». Emilie tombe des nues. Et se dit qu’ils sont bien bêtes avec leurs bouchons sur le périph’. Alors graduellement, ils commencent à introduire le télétravail à l’agence.
Deux ans plus tard, en 2015, ils font une tentative de «croissance externe» c'est-à-dire qu’ils s’associent à une autre agence pour faire grossir leur business. L’expérience n’est pas fructueuse. Mais ils retentent le coup. Euphoriques et spontanés, ils déménagent dans l’agence partenaire. Alors quand ça capote, c’est un électrochoc. Nous sommes en novembre 2015. Paris est frappée par les attentats meurtriers gravés jusqu’à présent dans les mémoires comme un traumatisme collectif. L’ambiance est intenable. «Beaucoup pensaient qu’on ne s’en remettrait pas».
D’un groupe de parisiens homogènes, ils passent à un «groupe de Français installés au quatre coins du pays et qui ont chacun leurs spécificités».
Alors, Emilie décide de quitter Paris pour Lyon. Très vite, elle entend parler de l’association dont elle est aujourd’hui trésorière. Cela lui permet de recréer un réseau, d’échanger avec des entrepreneurs sur des problématiques communes. Et petit à petit, recrue par recrue, client par client, ils retapent leur agence. D’un groupe de parisiens homogènes, ils passent à un «groupe de Français installés au quatre coins du pays et qui ont chacun leurs spécificités». Alors, le métier d’Emilie change. Elle s’évertue à «rendre le groupe fonctionnel». Elle travaille au quotidien à «créer du lien». Depuis cette prise de conscience que l’on «peut travailler autrement», l’apprentissage est continu. Emilie est très engagée dans cette aventure qu’elle juge libératrice. Même si elle comprend que le télétravail n’est pas une solution qui plaît à tous. Il y a des employés qui aiment la vie de bureau et elle est convaincue que les deux modes de fonctionnement doivent continuer d’exister.
Le télétravail est une brique d’un concept bien plus large qui commence à faire parler de lui: l’entreprise libérée. Ce n’est pas une liste de cases à cocher mais une perspective différente sur la manière de gérer une entreprise. Libérer son entreprise nécessite une évolution perpétuelle et des itérations à l’infini. Une autre brique de ce concept, par exemple, est la grille de salaire publique. «A l’agence, tout le monde connaît les salaires». Cette transparence facilite drastiquement le processus de recrutement parce qu’il y a «un salaire par profil». Le dirigeant dans l’entreprise libérée fait «entièrement confiance à ses employés». De ce fait, il peut déléguer plus. Les tâches sont mieux réparties.
Il y a un an, elle a lancé le podcast Libère ta boîte qui traite de ce sujet . En parallèle, elle développe une activité de coaching pour les dirigeants convaincus mais qui «ne savent pas par où commencer».
Emilie a immédiatement réinvesti le temps libéré en adoptant cette nouvelle méthodologie. Il y a un an, elle a lancé le podcast Libère ta boîte qui traite de ce sujet . En parallèle, elle développe une activité de coaching pour les dirigeants convaincus mais qui «ne savent pas par où commencer». Transformer son entreprise est un cheminement graduel. «C’est un peu comme consommer différemment, ça se fait par étape.» Si Emilie n’a pas d’enfant, on peut dire qu’elle est surinvestie dans l’éducation. Des entreprises. Derrière des dirigeants qui se sentent mieux, ce sont des dizaines d’employés qui bénéficient d’un environnement professionnel épanouissant. Pas à pas, elle dégomme les idées reçues et prouve qu’il existe des alternatives aux modèles ancrés si profondément dans notre perspective collective.
Elle continue d’être révoltée par la sous-représentation des femmes dans le numérique. Et explique que selon elle, le phénomène trouve son origine dans «les débuts des publicités d’Apple et de IBM qui ont fait de l’ordinateur personnel un produit masculin».
La quarantaine, pour Emilie, c’est la maturité de «s’assumer telle qu’elle est» et accepter qu’on ne puisse pas plaire à tout le monde. C’est un éloignement progressif du poids qu’elle accordait au regard des autres. Elle continue d’être révoltée par la sous-représentation des femmes dans le numérique. Et explique que selon elle, le phénomène trouve son origine dans «les débuts des publicités d’Apple et de IBM qui ont fait de l’ordinateur personnel un produit masculin». Elle est aussi scandalisée par les dirigeants à l’ancienne qui «crient pour qu’on sache qui est le patron».
Dans son emploi du temps chargé et hétérogène où l’humain règne en valeur maître, Emilie s’octroie des pauses grâce à son chien avec lequel elle entreprend régulièrement des balades en forêt. Emilie a la quarantaine engagée et libérée à la fois, un palmarès édifiant d’échecs qui lui ont permis de grandir et une entreprise qui continue de croître illustrant le propos qu’elle prêche au quotidien. «On peut faire autrement». Impactant des dizaines d’entreprises et autant d’employés heureux d’aller travailler. Ou souvent de télétravailler.
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